Je parle d’amour. Je dis : « aimez-moi », mais qu’est-ce vraiment que cet amour que je quémande ? Qu’est l’amour que je dis avoir éprouvé pour telle ou tel ? Aujourd’hui, avec le recul du temps, je ne suis plus très sûr de le savoir. J’aime en effet qui m’aime et ne crois pas à l’amour désespéré, celui dont l’objet n’entend rien. Aimer quelqu’un suppose, qu’à un moment ou un autre, il y ait réciprocité. J’ai tellement vu de mère blessées dans leur amour maternel — pourtant le plus désintéressé — parce que leur enfant, menant sa vie, ne s’occupait plus d’elles ; tant d’êtres blessés d’être ignorés avec leur amour orphelin… Plus l’amour se croit désintéressé plus il attend en retour : l’amour mystique attend d’être payé d’éternité ; l’amour romantique d’effusion. Le crapaud attend de l’amour qu’il le transforme en Prince et le ver de terre que l’étoile en fasse un ver luisant. Disant je t’aime, je ne fais donc rien d’autre que je suis digne d’être aimé et ce que je tends à l’objet de mon amour n’est rien de moins qu’un miroir dans lequel je me contemple.
Ce matin-là… Ce matin-là je m’éveillais avec un insondable sentiment de vide. Le ciel était étale, d’un bleu pâle absolu, le soleil faisait briller les feuillages, mettait l’espace en scène, enflammait les rosiers rouges dans le jardin en face de mon appartement, rien ne bougeait, c’était comme si tout avait été là, en place, de toute éternité, que rien jamais n’avait, ne devait changer. Une chaise, posée sur l’herbe évoquait l’absence totale de personnage, rien ne bougeait, le silence était total. Seul peut-être, si je forçais mon écoute, un très léger souffle venu de je ne savais où, indiquait que quelque chose, quelque part existait. Je m’assis dans un fauteuil, au soleil, sur le balcon, fermais les yeux. J’étais perdu. Il me semblait que tout ce que j’avais pu réaliser jusque là, que l’ensemble de ce que j’avais vécu était d’une complète vacuité, que j’avais, pour rien, vécu tout ce temps. Soudain, j’étais convaincu que les multiples projets qui, la veille encore, étaient ma raison...
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