Hier Ronald, dans son corbillard, m’a conduit à Carcassonne où je devais voir mon notaire. Comment trouver un véhicule plus approprié. Nous nous sommes donnés rendez-vous sur une terrasse de la ville basse en fin d’après-midi et j’ai rôdé deux ou trois heures dans les rues. Les frottements des villes m’exaspèrent, je ne supporte pas la promiscuité, les odeurs des autres, les fumées de tabac, les bribes de conversations ineptes que je ne peux ne pas entendre. J’ai réalisé que la proxémique était chez moi très large : voir mes contemporains à moins de deux mètres m’indispose. Je suis un vieux loup solitaire.
Ce matin-là… Ce matin-là je m’éveillais avec un insondable sentiment de vide. Le ciel était étale, d’un bleu pâle absolu, le soleil faisait briller les feuillages, mettait l’espace en scène, enflammait les rosiers rouges dans le jardin en face de mon appartement, rien ne bougeait, c’était comme si tout avait été là, en place, de toute éternité, que rien jamais n’avait, ne devait changer. Une chaise, posée sur l’herbe évoquait l’absence totale de personnage, rien ne bougeait, le silence était total. Seul peut-être, si je forçais mon écoute, un très léger souffle venu de je ne savais où, indiquait que quelque chose, quelque part existait. Je m’assis dans un fauteuil, au soleil, sur le balcon, fermais les yeux. J’étais perdu. Il me semblait que tout ce que j’avais pu réaliser jusque là, que l’ensemble de ce que j’avais vécu était d’une complète vacuité, que j’avais, pour rien, vécu tout ce temps. Soudain, j’étais convaincu que les multiples projets qui, la veille encore, étaient ma raison...
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