Lire, pour un écrivain, c’est endurer les coups de poignard de l’écriture. Pas toujours, c’est vrai, rarement, c’est vrai, mais de temps en temps, les insoutenables coups de poignards que lui portent la force d’autres écritures qui osent aller jusqu’où lui-même n’a su parvenir, qui lui révèlent d’autres continents d’écriture qu’il n’avait même pas soupçonnés et qui, parce qu’ils ont été ouverts par d’autres lui sont désormais interdits. L’écrivain est toujours un martyre de l’écriture offrant sa souffrance au dieu incertain du livre.
Ce matin-là… Ce matin-là je m’éveillais avec un insondable sentiment de vide. Le ciel était étale, d’un bleu pâle absolu, le soleil faisait briller les feuillages, mettait l’espace en scène, enflammait les rosiers rouges dans le jardin en face de mon appartement, rien ne bougeait, c’était comme si tout avait été là, en place, de toute éternité, que rien jamais n’avait, ne devait changer. Une chaise, posée sur l’herbe évoquait l’absence totale de personnage, rien ne bougeait, le silence était total. Seul peut-être, si je forçais mon écoute, un très léger souffle venu de je ne savais où, indiquait que quelque chose, quelque part existait. Je m’assis dans un fauteuil, au soleil, sur le balcon, fermais les yeux. J’étais perdu. Il me semblait que tout ce que j’avais pu réaliser jusque là, que l’ensemble de ce que j’avais vécu était d’une complète vacuité, que j’avais, pour rien, vécu tout ce temps. Soudain, j’étais convaincu que les multiples projets qui, la veille encore, étaient ma raison...
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