Il est un état mental qui me ravit, celui de ce moment précis entre sommeil et conscience éveillée, à la pointe de cet entre-deux, où le rêve se prolonge en même temps que la conscience du rêve s’installe, ce moment où le rêve devenant du récit s’organise de lui-même gommant les fantasmagories du songe pour esquisser une fiction organisée. Mais cet état dure peu car la conscience éveillée gagne vite du terrain. Perdant lentement l’imagination fabuleuse du rêve, la fable devient une narration et, ce faisant, perd tous ses charmes. Je ne vois plus l’intérêt de ce charmant jeune garçon et de cette séduisante petite fille qui, dans le fantastique repas que m’offrait une famille inconnue dans un pays inconnu, m’offraient leurs petits poèmes coloriés : ils ne sont appelés à jouer aucun rôle dans la construction de mes nouvelles ou romans. Pourtant, ces moments de l’éveil, comme autant de poèmes à venir, sont essentiels à mon imaginaire.
Regardant des photos de ma vie, je me trouve confronté à l'inutilité du temps : ces photos témoignent, et ne mentent pas, de ce que j'ai vécu et pourtant je ne m'y retrouve pas. Tel beau jeune homme svelte, presque dansant dans l'allée d'une forêt, je ne le reconnais pas même si j'ai la certitude absolue que ça été un moment de moi, tel enfant joufflu marchant difficilement soutenu de chaque côté par un de ses parents, tel adolescent en tenue de première communion s'appuyant sur l'épaule de son jeune frère… et ces dizaines d'autres jetées comme pour jalnner des espaces temporels variés me restent extérieurs. Certes j'ai été ceux ci à ces moments là mais je ne parviens à retrouver ni la texture ni la saveur de ces instants définitivement perdus. Ni madeleine ni flash de sensations : tout cela m'est définitivement perdu.
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